02. janvier 2017 · Commentaires fermés sur Un nouvelle proposition de lecture · Catégories: Lu, vu, entendu

Sonia Gouirand nous fait part de la critique d’un livre qu’elle a beaucoup aimé et qu’elle souhaite partager avec celles et ceux qui suivent le blog. Un autre livre de Sophie Chauveau.

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Difficile de classer ce livre à la fois roman, biographie et essai. Mais il est certain que l’écriture a permis à Sophie Chauveau d’atteindre son but : se réparer mais aussi autoriser ceux qui ont été abusés à se trouver une forme d’apaisement (la trouve-t-on jamais?) face à leur enfance en lambeaux.

Elle traite en effet d’un sujet difficile et surtout toujours tabou dans les classes aisées dont elle est issue : l’inceste transgénérationnel, banalisé comme mode de relation entre les membres de la famille et ô combien légitimé à son époque par les libertaires années soixante dix. On associe volontiers cette barbarie à des familles étiquetées cas sociaux et qu’il est rassurant d’imaginer dégénérées par la consanguinité. Il est certes beaucoup plus gênant d’envisager que l’inceste puisse être pratiqué dans les beaux quartiers et dans les familles bourgeoises d’intellectuels.

A la faveur d’une rencontre avec une cousine qui lui avoue avoir subi le même calvaire, Sophie Chauveau entreprend alors de nommer, puis de comprendre mais jamais d’excuser. Le début du livre est digne d’une fresque à la Dumas : elle pose les bases de cette dynastie déviante qui s’ enrichira grâce au dépeçage des animaux du Jardin des Plantes pendant le siège de Paris de 1870, Est-ce parce que ce marché noir finira par devenir légal au vu de de la nécessité de nourrir les Parisiens que le sentiment d’impunité va s’enraciner dans l’inconscient des descendants et préparer les horreurs à venir ? C’est une galerie de personnages d’une noirceur à la Jérôme Bosch que Sophie Chauveau va dépeindre. Puis faire une introspection lucide et honnête en revenant sur sa vie, ses difficultés relationnelles, ses craintes de perpétuer cette engeance lors de ses grossesses pour enfin énoncer sa souffrance face à la complicité passive de sa mère.

« Un enfant fait tout pour obtenir l’amour de sa mère parce qu’il ne peut pas vivre sans. Tout, c’est aussi bien se soumettre à l’homme qu’elle s’est choisi pour ne pas la perdre. Elle serait si triste… Je me suis soumise ». (p.216)

Généreuse, Sophie Chauveau écrit aussi pour redonner histoire aux victimes de pervers et le dernier chapitre s’intitule d’ailleurs « on peut en sortir ». Ce livre bouleversant mais qui sait éviter les écueils du voyeurisme et de la complaisance s’achève sur le message suivant : « Faites attention à vous, et s’il vous plaît, prenez un soin précieux de nos descendants ». A méditer et transmettre…

 

 

        

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