Voici les livres proposés par notre amie Simone :
« Une femme fuyant l’annonce » de David Grossman
Vous avez surement lu ce livre, prix Medicis Etranger 2011
Moi, cet été, j’ai mis beaucoup de temps à trouver le sens caché de cette fuite
D’autant plus que le prologue, très beau, très sensible, voire poétique qui plaçait trois enfants dans un contexte de guerre, aux prises avec la maladie, la souffrance physique, la mort mais aussi l’amour, l’affirmation de soi, le désir, l’espérance, le prologue, donc, n’annonçait rien de l’événementiel. il n’énonçait que l’origine des relations complexes et admirables entre ces trois protagonistes devenus adultes.
Ora, épouse d’Ilan qui l’a quittée en emmenant son fils aîné loin, très loin d’Israël où se déroule la grande Intifada, décide de quitter son domicile pour ne pas être présente quand on lui annoncera la mort de son second fils Ofer qui vient de se porter volontaire pour une expédition punitive de 28 jours extrêmement dangereuse, et ceci à l’issue même de son service militaire. Dans cette démarche de conjuration de la mort de son fils, elle entraine avec elle Avram son amour de jeunesse, le père d’Ofer qui n’a pas voulu le reconnaitre ni, jusque-là, entendre parler de lui. Elle lui apprend la paternité, lui fait connaitre la vie de son fils pour mémoire…
Le récit de cette randonnée fabuleuse dans une Galilée magnifique et des conversations continues d’Ora avec Avram est bouleversant. Il nous apprend l’histoire de cette famille israélienne, fondée sur l’amitié (et quelle amitié !) le don de soi, l’amour sous toutes ses formes, dans les déchirements et l’horreur de la guerre.
« À la lumière de ce que nous savons » de Zia Haider Rahman
Christian Bourgeois éditeur 2016
C’est un formidable premier roman !
Deux amis se retrouvent vingt ans après leurs études. Issus de milieux sociaux fort opposés mais dont les parents ont tous, dans des conditions bien différentes, vécu l’exil, Ils étudient ensemble les mathématiques à Oxford dans les années 80. Leurs itinéraires vont diverger. L’un, le narrateur, fils d’une grande famille pakistanaise est devenu banquier d’affaires, l’autre : Zafar fils d’une pauvre famille d’émigrés bangladais. Zafar, héros de ce roman, après avoir été un trader « magicien de la finance » va devenir avocat international dans l’humanitaire.
Il revient un jour en 2008 « défait et décharné » chez son ancien ami qui nous rapportera, en la commentant et la comparant à ses propres tourments, l’odyssée de Zafar, à travers le monde en perdition, les drames vécus dans les sociétés en guerre, ses conflits intimes, ses réflexions profondes sur la condition humaine, et ceci dans le récit magnifique de leur très longue conversation.
Les références au théorème de Gödel, à Einstein (principe d’incertitude), à Freud mais aussi à Philip Roth, à Sartre, à Churchill éclairent cette réflexion et justifient le titre du livre.
Oui on lit maintenant l’histoire de cet homme et du monde … à la lumière de ce que nous savons.
« Ce qu’il advint du sauvage blanc » de François Garde
Gallimard 2012 Prix Goncourt du premier roman
Passionnante cette histoire (vraie ?) d’un marin breton naufragé sur une côte d’Australie qu’on retrouve 17 ans après à Sydney, nu, tatoué sur tout le corps et qui a oublié son nom, la langue française et apparemment tout ce qui lui est arrivé pendant ces 17 années.
Il est confié à un anthropologue amateur le Vicomte de Vallombreuse qui séjourne alors en Australie. Le Vicomte cherche à établir avec lui un contact humain et respectueux, lui faire retrouver la mémoire, l’usage de la langue française et le faire revenir en Europe où son cas pourra être étudié par les plus hautes sociétés scientifiques.
Nous suivons ce récit dans la bouche du marin pour ce qui est de son naufrage et des premiers mois de son séjour sur cette côte et par la correspondance que le vicomte de Vallombreuse tient avec le Président de la Société Française de Géographie qui le conseille et l’encourage dans son projet de faire retrouver au marin ses origines, sa culture, sa mémoire et sa dignité. Chemin faisant nous suivons les progrès scientifiques de l’anthropologie au19ème siècle mais aussi les préjugés d’une société arrogante, raciste à laquelle est confronté l’anthropologue. L’écriture est fluide élégante, on lit ce livre avec passion impatiente, bonheur…
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