Merci Anne-Marie Bes. pour ce texte.
L’insolence des fleurs !
Elles sont toutes en fête !
Pourquoi un si grand chatoiement !
A tue tête, depuis ma fenêtre ouverte
Elles jettent vers le ciel leurs pinceaux de couleur,
C’est indécent cette cacophonie !
Cette douceur et cette violence réunies,
De tous côtés, point de repos pour le regard,
Un aveuglement. Charmant !
Et si je suis, moi, d’humeur morose,
Et si je prends mal
Toutes ces roses écloses,
Leur parfum entêtant, pour enivrer l’abeille
Vibrante d’amour pour elles !
L’odorante haie de photinias, sucrée de fleurs blanches leur offre un vrai reposoir.
Et si je boude la gerbe d’iris fraîchement déployée,
Savant bouquet, intense, violet
Trop vibrant, trop riche, trop parfait !
Les yeux noirs de Suzanne grimpent en majesté.
Mais qu’ont-ils donc à me regarder ?
Lumineux, calmes, posés.
Et si je veux me cacher !
Comme la violette déjà fanée
Comme le muguet à peine inquiet
De quel bonheur est-il porteur dans sa redingote verte ?
La glycine ! Ô Merveille ! a déjà perdu bien de ses attraits
Tant mieux, c’est agaçant tant de beauté.
Les tulipes, raides et fières, les joues enflammées jacassent sur le bas- côté.
Les coquelicots au loin, ponctuent de rouge tout le chemin
Entremêlés à leurs lointains cousins les escholtzias
Qui friment dans des habits aussi brillants que le soleil.
Là- bas, un peu à l’étourdi, fleurit un petit coussin rose
Dans un grand pot vieillot.
Le grand spectacle annuel du divin magicien a sonné les trois coups.
Tout est ordonnancement dans cet apparent chaos.
La terre s’emplit d’échos et d’arcs- en- ciel.
L’insecte se réveille, l’oiseau se prépare,
Chante, bruisse, volète, parfume et se déploie la vie.
Ils ont l’air de ne s’apercevoir de rien !
Le printemps leur suffit !
C’est beau l’insouciance !
Ils s’enivrent de lumière, d’azur, ils dansent dans l’or des jours heureux !
Trop, ça en est trop, je referme la fenêtre, cette volupté me fait pleurer !
Et j’ai perdu toute innocence !
Anne Marie Bes.